Paul F. Bandia | DOI: 10.17457/IF/2020.BA | Texte intégral
La traductologie postcoloniale s’est surtout centrée sur les stratégies utilisées par les sujets postcoloniaux afin de subvertir la langue, sujets qui, par le fait même, créent un discours contre-hégémonique et anti-colonialiste. La recherche dans ce domaine de la traductologie suit les courants développés dans les études postcoloniales, largement définies en terme de dichotomies basées sur les oppositions entre l’Occident et l’Orient, le colonisé et le colonisateur, le Sud et le Nord mondialisé. Bien que cette approche ait permis de développer la compréhension des phénomènes de multilinguisme et de la sociolinguistique des relations de pouvoir, elle a souvent omis de tenir compte des pratiques linguistiques propres à la postcolonie, des pratiques relativement autonomes et non subordonnées aux relations avec l’ancienne métropole coloniale. Le présent travail se penche sur l’hétérogénéité de la pratique langagière dans la postcolonie et des défis qu’elle pose pour la théorie normative de la traduction qui se base sur le transfert ou l’échange entre systèmes linguistiques ou culturels stables. La littérature postcoloniale, à ses débuts, était écrite dans une langue coloniale qui se prêtait aisément aux pratiques de traduction monolingues, malgré ses spécificités locales. Aujourd’hui, la réalité est celle d’une littérature hétérolingue où plusieurs langues et variétés de langue coexistent, mettant à l’épreuve les principes de traduction monolingue et l’ethnocentrisme qui sont au cœur de la traduction homogénéisante.